Le fantasme irréalisable
Lundi 23 mars 2009En ce moment, ma vie c’est vraiment trop de la merde. Je suis à temps plein sur ce putain de mémoire, je suis à fond dans la théorie, du coup quand je vois des gens qui sont normaux, dans la vie active, la tête dans le guidon, je comprends pas ce qu’il se passe. Et surtout, en ce moment, faut pas me faire chier. Mais faut pas me faire chier ! Genre l’autre fois j’expliquais à un ancien collègue que j’avais lu une théorie qui disait que si les gamins avaient peur du monstre sous le lit, c’est parce qu’il y a quelques temps, on vivait dans les arbres et que le danger venait du coup de dessous. Un vieux truc archaïque quoi. Comme il est à fond sur la psychanalyse, il se permet de me lancer un petit « j’aime bien la psychologie de comptoir, comme ça on oublie que ce petit gamin il a une histoire, un vécu, avec sa mère et blablabla et blablabla ». Alors moi j’aime bien la psychanalyse. La psychanalyse c’est ce qui permet de te déculpabiliser de tout. C’est pas ma faute c’est ma mère. J’ai envie de pisser, la faute à maman. MERCI MAMAN !! Oui je caricature et alors ? Bon bref il m’a saoulé, du coup j’ai dit que chier sur trois millions d’années d’évolution pour ramener tout ça à une connasse qui a pas voulu lire une histoire à son gamin c’était pas du tout prétentieux et qu’au fond la psychanalyse c’était encore ce qu’il y avait de mieux pour oublier qu’on est un peu des animaux et qu’on fait caca. Même ta mère. C’est dire. Et je me suis tirée.
Ouais je suis trop une rebelle je sais.
Une autre fois sinon j’ai tonché la porte d’un pote parce qu’il avait une demi heure de retard. Alors je l’ai pas défoncée, c’est une grosse porte et je suis une fille qui a la particularité de pas avoir de force du tout. Du tout du tout. Mais je l’ai bien tonchée !
Bon bref, ça ira mieux quand ce putain de mémoire sera fini. Et donc, pour reprendre à la base là où je voulais en venir au début, le fantasme irréalisable, c’est parce que cette violence que j’expulse en ce moment, hé ben au moment où j’aurai le plus voulu l’exprimer, je n’ai pas pu…
Je m’explique.
Je fais mon mémoire sur les adolescents violents. Mais genre les ado violents quoi. Pas ceux qui pètent un plomb, ceux qui te disent « tu me fais chier je vais fuguer » non. Ceux qui viennent te voir à 10h du soir pour que tu leurs fasses à bouffer, à qui tu dis non et qui t’en collent une direct sans passer par la case négociation ou conflit. Les ados qui te collent un pain pour pouvoir se tirer avec la caisse. Les ados qui ont déjà un casier judiciaire long comme le bras et que ça fait marrer. Les ados qui se défoncent la gueule sous ton nez pas pour se confronter à l’autorité, juste pour se défoncer et oublier. Ces ados là, je les ai eu sur mon deuxième stage, quand je bossais avec des rémis sans famille. J’ai eu la joie de les croiser un an plus tard sur mon stage trois avec Clodo le clodo, aussi inadaptés qu’en foyers. En gros, ces mômes, une fois majeur, la protection de l’enfance s’arrête (logique) et ils passent directement dans les bas fonds de la société, ce qu’on appelle le bas seuil. Avec les plus exclus des exclus. Ils peuvent pas vivre au coeur de la société, ils ont pas compris comment ça marchait.
Bon là forcément ça m’interpelle un peu quoi. Et donc pour être honnête, c’est pas toujours un plaisir de bosser avec eux, voire jamais, ils sont violents, ils ont pas intégrés la notion de règles, aussi minimes soient elles, ils volent, ils cassent les couilles et y a pas moyen de bosser avec eux, ils refusent, il n’y a pas de lien possible. Donc en gros les questions que je me pose c’est : bordel mais il se passe quoi là ils sortent tous de la protection de l’enfance… Qu’est-ce qui fait que ces gosses ils sont comme ça et qu’est-ce qu’on peut faire quand ils sont mineurs pour les aider à pas finir clochard à 18 ans. Tout un programme quoi.
Et donc (c’est long mais on finira par y arriver) je suis repassée sur mon stage 3 il y a peu, pour dire bonjour et reprendre un petit coup de terrain. Et il y avait un de ces « ados » (20 ans sur le papier). Et il a été chiant ! Mais chiant !!! Les insultes, les menaces pfffff. Et il m’a tellement gonflée, que j’ai eu un espèce de flash là comme ça, un fantasme que j’aurai vendu ma grand-mère à un gérontophile pour pouvoir l’assouvir… Je me suis vue avec une perche à chiens, vous savez les perches pour les types qui bossent pour la fourrière. Ben je me suis vue avec ça, en train de l’attraper et HOP ! HOP ! HOP ! OUVRE LA PORTE !
Putain je suis autant morbide qu’eux… Quel métier de con franchement…